Chapitre XIX
Assis sur la terrasse de l’hôtel où était descendu Morane, à Hong-Kong, Bob et l’inspecteur Crance regardaient le soleil se coucher au-delà de la Chine, tout en sirotant des boissons rafraîchissantes et délicatement parfumées. Le policier portait toujours le bras gauche en écharpe afin de ne pas risquer de rouvrir sa blessure.
— Je suppose, Bob, dit-il, que vous allez regagner la France à présent.
Morane hocha la tête affirmativement.
— Par le prochain avion à bord duquel je trouverai place, inspecteur. Je commence à en avoir assez de Hong-Kong et de Macao, où les miséreux font la loi.
Bob s’interrompit et sourit, pour continuer ensuite :
— L’Empereur de Macao a cessé de vivre à présent et le reste de sa bande, privé de chef, ne tardera pas à se désagréger. On n’a donc plus besoin de moi ici. J’ai hâte de retrouver Paris et mon appartement du quai Voltaire pour m’y remettre de mes émotions en compagnie de quelques bons livres. Je ferai également de longues promenades au bord de la Seine. C’est le printemps, et les arbres doivent y être en fleurs.
À ce moment, un garçon s’inclina devant Morane et lui présenta un plateau sur lequel se trouvaient deux plis bleus.
— Deux télégrammes pour vous, sir…
Bob prit les plis et décacheta l’un d’eux. Il portait simplement ces mots :
Ai appris votre présence à Hong-Kong. Stop. Suis en Australie dans famille. Prends premier avion pour venir vous rejoindre. Stop. Amitiés. Stop. Bill.
Bill Ballantine était un Écossais ami de Morane. Tous deux avaient, ensemble, vécu pas mal d’aventures aux quatre coins du monde. Bob ouvrit le second télégramme, qui venait de Paris et disait :
Se passent étranges choses au Mexique. Stop. Pas de reporter disponible. Proposons vous y rendiez. Stop. Instructions et argent vous attendront consulat de France à Mexico. Stop. Attendons réponse d’urgence. Stop. Reflets.
Il s’agissait cette fois d’un grand magazine français d’actualités pour lequel Bob remplissait de temps à autre les fonctions d’envoyé extraordinaire.
Morane tendit les deux télégrammes à l’inspecteur Crance qui, quand il eut lu, les déposa sur la table, pour demander :
— Allez-vous accepter de partir pour le Mexique, Bob ? Peut-être l’ignorez-vous, il y a du pétard par là. Et puis, c’est assez loin de Paris…
— Je m’en doute, fit Morane, mais je puis difficilement laisser Reflets dans l’embarras. Je vais attendre l’arrivée de Bill et tenter de le décider à m’accompagner à Mexico. Si Reflets m’y envoie c’est que, réellement, il doit s’y passer des choses extraordinaires. Sans doute aurai-je besoin d’un coup de l’épaule puissante de ce vieux Bill. Et puis, jadis, le Mexique a fait rêver les Conquistadors. Pourquoi ne me ferait-il pas rêver moi aussi ?
FIN